Ma pratique photographique se développe autour de jeux avec le « je ». Par le mot « jeu », j’entends une forme d’exercice, ou d’activité, dont les règles sont définies préalablement par nul autre que moi. Le jeu peut prendre différentes formes mais il implique toujours un corps : le mien. Ce corps est mon outil de travail, il est totalement malléable, prêt à se cacher ou à se contorsionner pour se plier aux règles du jeu. Les règles du jeu sont chaque fois différentes, néanmoins, elles partagent presque toutes le même dénominateur, le même objectif : faire surgir une histoire par l’absurdité d’une situation. Ma démarche s’inscrit également dans une volonté d’amuser le spectateur et, le cas échéant, de le faire rire. Les photographies sont toujours mises en scène, voire chorégraphiées, à l’avance. Elles sont performées, l’engagement du corps est indispensable et le déguisement est choisi pour la photographie, de même que la pose est prise pour la photographie.
Certaines images sont hybrides puisqu’elles mettent en jeu la broderie, un autre médium. Et, en plus, d’ajouter de la matière au tirage, la broderie vient ajouter une nouvelle couche à l’histoire, un niveau de lecture supplémentaire.
Lorsque je photographie je joue car il est important pour moi que la pratique photographique soit un amusement. Lorsque je photographie je joue, je joue à être autre, tantôt membre de famille, tantôt personnage inventé de toute pièce. Bien que je sois mon propre modèle, je ne considère pas mes images comme des autoportraits. Ainsi le jeu avec le « je » est constamment à la frontière entre le moi et le non-moi ou entre le moi et le personnage.
Au croisement entre personnage, masque et artisanat, c’est bien une quête de l’origine qui se joue au travers de mes images, la quête de mon origine.